Célébré hier mardi le 11 Février, le 25e anniversaire du Protocole de Brazzaville, prélude à l'émancipation de l'Afrique australe, ressemblait à s'y méprendre à un cérémonial à la gloire du chef d'État congolais.
Un hommage peut en cacher un autre. Hier mardi, le Congo a célébré avec faste en son Palais des Congrès le 25e anniversaire du " Protocole de Brazzaville sur la paix en Afrique australe ". Cérémonie placée sous le patronage posthume de l'icône sud-africaine Nelson Mandela, dont le décès avait au demeurant contraint le président du cru Denis Sassou Nguesso de différer les festivités initialement programmées le 13 décembre 2013. Va donc pour le 11 février 2014, soit 24 ans jour pour jour après la libération de "Madiba". Mais qu'on ne s'y trompe pas: la commémoration, orchestrée par Richard Attias et son épouse Cécilia, autrefois Sarkozy, avait avant tout pour vocation de ceindre de lauriers le front du maître de céans, hôte en 1988 de ce pacte miraculeux.
Happening haut-de-gamme
L'événement méritait-il que l'on fêtât solennellement son quart-de-siècle ? Sans l'ombre d'un doute: c'est à cet accord, avalisé par l'Angola, Cuba et l'Afrique du Sud et formellement scellé neuf jours plus tard au siège new-yorkais des Nations unies, que l'on doit l'accession à l'indépendance de la Namibie, le retrait du corps expéditionnaire castriste d'Angola et le repli des forces sud-africaines des deux pays précités. Pour autant, la dramaturgie de cette liturgie laïque et le casting des VIPs présent avaient de quoi intriguer. Certes, le Sud-Africain Jacob Zuma trônait au premier rang au côté des chefs d'Etat du Togo et de Sao Tomé-et-Principe, ainsi que de l'ex-président sénégalais Abdoulaye Wade. Certes, la venue d'une brochette de prix Nobel de la Paix -le Finlandais Martti Ahtisaari, l'Egyptien Mohamed al-Baradei et le Bengladeshi Muhammad Yunus-, flanqués de l'insoupçonnable Irlandaise Mary Robinson, conférait à ce happening haut-de-gamme un lustre indéniable. Mais comment ne pas s'étonner de l'absence de l'Angolais Jose Eduardo Dos Santos comme de celle du Namibien Hifikepunye Pohamba, tous deux concernés au premier chef ?
En revanche, l'avion venu de Paris et affrété par les soins d'Attias aura acheminé sur la rive droite du fleuve Congo une cohorte d'invités quelque peu disparate. A sa tête bien sûr le mystérieux Jean-Yves Ollivier, héros du captivant documentaire Plot for Peace -Complot pour la Paix-, qui accomplit le tour de force de se voir décoré pour services rendus par le régime de l'apartheid puis par le rescapé du bagne insulaire de Robben Island, patriarche vénéré de la Nation Arc-en-Ciel. De même, Jean-Christophe Mitterrand, l'ex-ministre Michel Roussin ou le sénateur du Loir-et-Cher Jeanny Lorgeoux peuvent à bon droit revendiquer le statut de témoins privilégiés, voire d'acteurs mineurs de cette épisode historique. Plus inattendue, pour les non-initiés, la présence d'une poignée de vétérans du PAF et de l'arène médiatique hexagonale saisis sur le tard par le virus africain, tels Charles Villeneuve, élevé à la dignité de M. Loyal du cérémonial, Etienne Mougeotte ou Guillaume Durand. Lequel animera avec une éprouvante désinvolture la table ronde des Nobel.
Le film évoqué ci-dessus eut, entre autres mérites, celui de sortir des oubliettes le passé marxiste-léniniste du colonel -puis général- Sassou Nguesso. A la fin des années 1970, le patron du Comité central du Parti congolais du Travail, promu à la présidence par ses camarades sur fond de Guerre froide, défilait en uniforme, un foulard rouge autour du cou. Et les profils juxtaposés de Marx, Engels et Lénine ornaient alors les artères de Brazza, ex-capitale de la France libre. A la faveur de son adresse finale, l'actuel médiateur du brasier centrafricain a annoncé hier la création, " à dater de ce jour ", d'une Fondation pour la paix. Acceptons-en l'augure. Même si l'initiative émane d'un ex-prétorien qui reconquit en 1997 le pouvoir par les armes, au terme d'un conflit fatal à environ 400 000 civils. Il est vrai que, depuis lors, l'ancien boss des miliciens " Cobras " a bien changé. Reste à savoir s'il a changé en bien.
Par Vincent Hugeux
NOTE: En réalité nous dit MEDIAPART, l'absence très remarqué du Président angolais, Dos Santos a volé la vedette à son homologue congolais, Denis Sassou Nguesso:
José Eduardo dos Santos a survolé tous les prestigieux invités présents et avait brillé par son absence ! Il n’avait pas daigné faire le déplacement ; comme d’ailleurs le Président Namibien Hifikepunye Pohamba. Leur défection n’était pas passée inaperçue, pas même pour les hôtes « illustres » racolés à prix d’or par l’organisation bling-bling de la manifestation.
L’envahisseur et vainqueur de Kimongo n’a pas manqué ainsi l’occasion de rappeler par ce camouflet, à son ancien poulain de 1997, tout le mépris qui lui porte maintenant. Ne comprenne pas qui ne voudra pas comprendre, cet homme est devenu le cauchemar de notre dictateur !